#Melvinki « Ce n’est pas vrai, où j’ai mis ce fichu album ? » Fouillant nerveusement le contenu d’un carton où de nombreux vinyles étaient rangés en vrac, je jurais dans ma barbe en mettant le désordre dans notre nouveau salon. Ma femme et moi venions de nous installer dans un appartement de Kensington, non loin du cabinet où je pratiquais la chirurgie obstétrique et où nous nous étions rencontrés quinze ans plus tôt pour la première fois. Les cartons entrouverts composaient notre principal élément de décoration. Un nouveau nid douillet pour les jeunes quarantenaires que nous étions devenus. Et suffisamment grand pour laisser s’épanouir le couple de dalmatiens que nous avions adopté quelques années plus tôt. Lorsqu’enfin je mis la main sur l’album de Massive Attack que je peinais tant à retrouver, un polaroïd glissa à terre. Je le ramassai et reconnu Binki, ma tendre épouse, et Aeden, mon ami et beau frère. Les visages serrés l’un contre l’autre, les lèvres de mon ami épousant le front de celle que j’aimais, je fronçai les sourcils avant de découvrir avec stupeur la date inscrite au dos « Hiver 2013 ». À cette époque, Binki avait quitté son mari pour se mettre en couple avec moi. Quant à Aeden, il faisait désespérément la coure à ma sœur cadette… Pourquoi a t-elle finit par céder ? C’est une question à laquelle je ne trouverai jamais de réponse satisfaisante. Bref, ces deux-là avaient beau être proches, cette photo me terrassa. « BINKI ! Tu peux venir dans le salon, s’il te plait ? J’ai quelque chose à te demander… » Assis en tailleur sur le parquet du salon, je veillais son arrivée. Le bruit de ses pas m’alerta de son approche et j’en profitai pour adopter la mine renfrognée qu’elle me connaissait si bien. Elle apparu alors dans l’encadrure de la porte, me rappelant sa beauté qui grandissait au fil des années tandis que je ressemblais de plus en plus à mon oncle Bolton.  « Oui ? Qu'est ce qu'il y a ? Et je suis une daube. Je n’arrive pas à monter ton meuble. J'essaie encore une demi heure, après il finit au feu. » Mes yeux s’écarquillèrent de façon offusquée. J’avais lourdement insisté pour aller chez un antiquaire sur Portobello afin d’aménager notre nouvel espace, mais Binki trouvait idiot de dépenser nos économies pour des meubles qui avaient déjà servis. Là où elle souhaitait faire table rase, je cherchais plutôt un héritage. Mais las de me disputer avec elle, j’avais fini par la suivre chez l’enseigne aux couleurs de son pays d’origine. Après tout, si posséder le même intérieur que dans un catalogue la rassurait, j’étais là pour satisfaire ses désirs. « Mon meuble ? Tu plaisantes, je t’avais dit de ne pas te lancer là dedans, mais faut croire j’ai épousé la pire tête de mule du pays. » Je me levai pour être à sa hauteur, cachant la photographie d’une main dans le dos. « Mais là n'est pas la question... Quand tu as quitté Archie, tu passais beaucoup de temps avec Aeden, n'est-ce pas ? Je veux dire, avant de te mettre avec moi...» Je plissai les yeux d'un air suspicieux, comme pour mieux observer ses traits. N’est pas Sherlock qui veut.  

UC  

#Melvinki Retourner sur Kensington me ramenait inéluctablement à me souvenirs d'enfance, et à mon ancien foyer. Aux plates bandes de ma mère et l'odeur de lavande dans le jardin, lorsque mes parents étaient encore amoureux, avant que le clan Zylkke ne vole en éclats. Même si certains de mes souvenirs étaient douloureux, la grande majorité faisait parti de ces instants de bonheur que je continuais de chérir. Ces moments heureux que mes parents m'avaient offert, et que je souhaitais construire à mon tour avec Melvin dans notre petit nid.
« Foutu meuble suédois de merde. » maugréai-je en m'étalant à la fois de manière tragique et désespérée sur le lit -l'un des rares meubles peuplant notre appartement-. Voilà une heure que je m'arrachais les cheveux sur le montage de ce bureau qui était décrit pourtant comme une tâche facile. Je blasphémais envers ma patrie, mais j'étais excédée et frustrée de ne pas y parvenir. Me faire agresser par une vis avait eu raison de ma patience et je décidai de faire une pause. Là, tout de suite, à même le parquet me paraissait l'endroit idéal. « BINKI ! Tu peux venir dans le salon, s’il te plait ? J’ai quelque chose à te demander… » Je soupirai. Ma pause fut de bien courte durée mais il avait dit "s'il te plaît". Je me relevai péniblement et sortis de la chambre pour me rendre dans le salon. Je baissai le regard vers mon bien aimé, assis sur le sol. « Oui ? Qu'est ce qu'il y a ? Et je suis une daube. J'arrive pas à monter ton meuble. J'essaie encore une demi heure, après il finit au feu. » Il prit cet air offensé, comme si je venais de dire une chose horrible. « Mon meuble ? Tu plaisantes, je t’avais dit de ne pas te lancer là dedans, mais faut croire j’ai épousé la pire tête de mule du pays. » Je fronçai les sourcils. Certes, il m'avait cédé concernant le choix d'une partie du mobilier, mais j'ignorais que cela lui avait tant coûté, au point qu'il le remette sur le tapis à la première occasion. Il se releva et je dus incliner ma tête pour continuer d'affronter son regard. « Mais là n'est pas la question... Quand tu as quitté Archie, tu passais beaucoup de temps avec Aeden, n'est-ce pas ? Je veux dire, avant de te mettre avec moi...» m'interrogea t-il comme l'aurait fait un inspecteur. Vu ses talents d'imitateur j'aurais plutôt penché pour Columbo dans ses vieux jours. Aussi, entendre mon mari prononcer le diminutif de mon ex me faisait toujours un curieux effet. « Je te signale que j'ai du remettre pas mal de choses en question avant de le quitter. Et que ça n'a pas été franchement une partie de plaisir. Donc oui j'ai passé du temps avec Aeden qui m'a toujours été d'un grand soutien. Pourquoi ressasses tu ça maintenant ? » Je le dévisageai, espérant comprendre rapidement où il voulait en venir.