Les minutes passent et je feuillette toujours ce magazine people, à l'affût du moindre article qui pourrait débrancher mon cerveau pendant quelques instants. Comme toutes les autres femmes présentes dans la pièce, j'attends patiemment que le Dr Babcock termine sa consultation. Enfin, "patiemment" est un bien grand mot. Peut-on encore parler de patience lorsque son gynécologue accumule plus de deux heures de retard ? A croire qu'elle a fini par se perdre dans les méandres des trompes de Phallope de sa patiente. Disons plutôt que je n'ai pas le choix, Mère Ménopause ayant décidé de me pourrir ma semaine avec ces fichues sueurs nocturnes. Il est bien loin le temps où j'étais en sueur dans mon lit la nuit parce que Diego/Fredo/Antonio/Gigolo venait de me faire ma fête.

Fatiguée par les scoops des paparazzis (fait rarissime qui démontre bien l'étendue de ma lassitude), je repose le magazine sur la table basse et observe la décoration de la pièce, élégante et féminine. Mon attention se porte alors sur les autres patientes du docteur. En théorie, il reste encore deux femmes avant que ce ne soit mon tour. Je détaille ma plus proche voisine d'un oeil aiguisé. Jeune, belle, on dirait moi. Espérant faire passer le temps plus vite, je décide d'entamer la conversation avec elle, plutôt cash : « Pourquoi vous êtes ici vous ? Je n'ai pas l'impression que ce soit pour une mycose, ni même une IST. Vous avez l'air trop propre. Enfin, comme je le dis toujours, remarquez que les apparences sont parfois trompeuses. J'en suis le plus bel exemple, tenez, essayons : quel âge me donneriez-vous ? 27, 28 ans je suppose ? On me dit souvent qu'avec des vêtements pour adolescentes, je passerais facilement pour une étudiante. Je suis bien obligée de reconnaître que les personnes en question ont tout à fait raison... Ah ! Mais avec tout ça, je deviens horriblement malpolie, j'en ai oublié de me présenter : Fran Fine »

U.C

J’attrape un magazine, le feuillette quelques secondes, mais le repose presque aussitôt. A l’intérieur ? Ni plus ni moins qu’un ramassé de ragots ! Certes, je me suis longtemps délectée de ce genre de lecture, mais après en avoir fait les frais, j’ai bien rapidement déchanté. Quand ma sex-tape et mes photos de charmes ont commencé à circuler sur la toile, beaucoup de grands tabloïds s’y sont aussi intéressés et durant plusieurs semaines, j’ai fait bien malgré moi la une de tous les torchons britanniques. Richard, de son côté, n’est pas resté en reste puisque sa crédibilité en a pris un sacré coup. Aujourd’hui, il n’a pour ainsi dire aucune chance d’obtenir la place de premier ministre. Si je me sens coupable ? Je ne sais pas trop. Quelque part, je m’en veux de l’avoir fait souffrir, car il a toujours été formidable avec moi –mais je lui en veux aussi d'avoir décidé de demander le divorce sans même me laisser la chance de m’expliquer. Vexée, blessée, j’ai tout simplement décidé de lui faire payer et c’est en partie pour ça que je me montre aussi exécrable avec lui depuis le début de la procédure. Mais ça n’explique en rien pourquoi je me tortille sur le siège d’une salle d’attente depuis près de trois heures, n’est-ce pas ? Et bien la raison est simple… J’ai rendez-vous avec mon gynécologue pour une visite de routine. Même si je n’ai jamais connu ma mère, je sais que les femmes de sa famille ont bien souvent déclaré des cancers du col de l’utérus, raison pour laquelle je suis suivie de près.

Seulement, je commence à en avoir ma claque de poireauter comme une imbécile. Une belle brune se tourne alors vers moi. « Pourquoi vous êtes ici vous ? Je n'ai pas l'impression que ce soit pour une mycose, ni même une IST. Vous avez l'air trop propre. Enfin, comme je le dis toujours, remarquez que les apparences sont parfois trompeuses. J'en suis le plus bel exemple, tenez, essayons : quel âge me donneriez-vous ? 27, 28 ans je suppose ? On me dit souvent qu'avec des vêtements pour adolescentes, je passerais facilement pour une étudiante. Je suis bien obligée de reconnaître que les personnes en question ont tout à fait raison... Ah ! Mais avec tout ça, je deviens horriblement malpolie, j'en ai oublié de me présenter : Fran Fine » J’étouffe un rire et tend ma main pour la saluer. Cette femme est vraiment très étrange et le moins qu'on puisse dire, c'est qu'elle n'a pas la langue dans sa poche! « Enchantée Fran, moi c’est Anaïs. Anaïs Chevalier… » Tout ce que j’espère, c’est qu’en lui donnant mon nom de jeune fille, elle ne fera pas le rapprochement avec Richard ou encore avec les scandales qui ont rythmés notre vie. L’idéal serait même qu’elle soit étrangère… « Pour être tout à fait franche, je ne vous aurais pas donné plus de trente-deux ans, mais de toute manière, c’est très impoli de demander son âge à une femme ! » En tout cas, c’est ce que mon père m’a toujours dit. « Je suis ici pour une simple visite de routine. Et vous ? » je demande sans la moindre pudeur. Après tout, c’est elle qui a lancé le sujet.

uc.